Penser et agir pour l’entrepreneuriat en Afrique

Impact investing

Quel financement pour le secteur privé en Afrique ? La place de l’investissement d’impact ?

Le secteur privé est un moteur de la croissance. Pourtant, les entreprises africaines, quelle que soit leur taille, souffrent d’un défaut de financement en particulier dans des zones où les…

Le secteur privé est un moteur de la croissance. Pourtant, les entreprises africaines, quelle que soit leur taille, souffrent d’un défaut de financement en particulier dans des zones où les financements traditionnels sont insuffisants. L’investissement d’impact serait-il une alternative possible ?

Les entreprises – grandes, moyennes ou petites – représentent l’un des principaux moteurs de la croissance économique. Elles participent activement à la création d’emplois, génèrent des revenus et contribuent au bien-être social et environnemental. Cependant, le secteur privé en Afrique fait face à un défaut de financement important, surtout dans les zones où les financements traditionnels sont insuffisants. C’est ici que l’investissement d’impact intervient comme une alternative prometteuse, surtout pour les entreprises ayant des retombées significatives sur leurs communautés.

 

L’investissement d’impact, un secteur mal défini

L’investissement d’impact apparaît comme une alternative récente au financement du secteur privé, notamment pour les entreprises engendrant de fortes retombées extra-financières sur leur communauté. L’investissement d’impact connaît une croissance à deux chiffres (14%) en 5 ans (2017-2022) en Afrique, mais reste un segment peu développé eu égard aux autres formes de financement. Il existe un réel engouement pour cette innovation financière, notamment de la part des bailleurs et des gouvernements. En dépit de cet intérêt, ce secteur reste largement méconnu. Dans une étude récente, la Chaire Investissement d’Impact de la Ferdi cherche à améliorer la connaissance de l’investissement d’impact en Afrique en publiant une cartographie de l’investissement d’impact en Afrique.

 

Spécificités et rôle dans le financement du développement

L’investissement d’impact est une forme d’investissement qui utilise des outils financiers classiques comme le financement par dettes ou par prise de participation par exemple. Sa spécificité réside dans l’orientation de son financement vers des entreprises qui génèrent des impacts extra-financiers élevés, qu’ils soient économiques (par exemple, création d’emplois indirects), sociaux (par exemple, amélioration de l’offre de soins) ou environnementaux (par exemple, solution de production d’énergie renouvelable). De même, il considère les entreprises n’ayant pas accès aux financements classiques tels les crédits bancaires, en raison de leur balance rendement-risque plutôt défavorable.

Les investisseurs d’impact jouent, à cet effet, un rôle crucial pour combler le manque de financement pour de nombreuses entreprises en Afrique.

Ils prennent le risque d’investir dans ces entreprises, à différentes étapes de son développement, en dépit d’un rendement pouvant être inférieur aux taux du marché. La contrepartie de cette rentabilité réduite et de ce risque accru est que les investissements fournis vont générer des impacts élevés pour la communauté. L’investissement d’impact permet à cet effet d’aider des entrepreneurs à lancer leur projet, à développer leurs produits, à renforcer leurs stratégies de marché et à pouvoir s’auto-financer. Un exemple emblématique est celui de la Laiterie du Berger (LDB), une entreprise sénégalaise ayant été financée par l’ investisseur d’impact I&P. Avec plus de 700 000 euros investis sur plusieurs années, I&P a soutenu LDB dès ses débuts, malgré des bénéfices initiaux modestes. D’autres investisseurs d’impacts l’ont, par la suite, accompagnée financièrement dans son développement. Aujourd’hui, LDB emploie plus d’un millier de personnes et participe à l’amélioration de la chaîne de valeur agricole, de la nutrition, des revenus et du PIB du Sénégal – démontrant l’importance de l’investissement d’impact et de ses acteurs dans le financement du développement.

 

Quelques données sur les investisseurs d’impact en Afrique

Sur le continent africain, les objectifs de génération d’impacts sont souvent basés sur la capacité à atteindre les Objectifs du Développement Durable (ODD) et à contribuer au plan de développement national des pays dans lesquels ils investissent, ce qui peut ne pas être le cas dans d’autres pays. Ainsi, les activités économiques des entreprises financées sont souvent liées à l’un ou à la plupart des 17 ODD.

En outre, compte tenu de leur double objectif – impact et rendement – les investisseurs d’impact cherchent à financer des secteurs leur permettant d’avoir un impact à l’échelle et un rendement financier possible et acceptable. C’est pourquoi les secteurs dans lesquels ils investissent en Afrique se concentrent sur l’agriculture, la finance et l’énergie. Ces trois secteurs répondent à cette double contrainte. Ces secteurs sont parmi les secteurs présentant un taux de croissance élevé sur le continent mais également les secteurs employant le plus d’actifs.

Le secteur agricole, par exemple, a une importance cruciale à la fois en termes économiques en employant plus de la moitié de la population active en Afrique (51,71% des emplois sur le continent africain est dans le secteur agricole, World Development Indicator), sociaux en raison de la pauvreté dans les zones rurales et environnementaux sachant que l’agriculture est à la fois le réceptacle et une solution aux défis environnementaux (changement climatique, biodiversité, pollution).

 

Cependant, la cartographie réalisée par la Chaire Investissement d’impact montre qu’une majorité des fonds d’investissement opérant en Afrique ont leur siège social en dehors du continent, principalement en Amérique du Nord et en Europe. Les fonds africains représentent à peine plus de 16 % de l’activité des fonds opérant sur le continent, avec une concentration notable dans quelques pays anglophones comme le Nigeria, le Kenya et l’Afrique du Sud. C’est également dans ces pays que la plupart des entreprises financées sont situées.

Le paysage de l’investissement d’impact en Afrique est par ailleurs dominé par des fonds de taille moyenne (de 1 à 250 millions USD), soit 54,5% des investisseurs d’impact identifiés sur le continent. Cependant, 80% des actifs sous gestion de l’ensemble de l’investissement d’impact en Afrique, de l’ordre de 108 milliards USD, sont gérés par quelques méga-fonds (au-delà de 1 000 millions USD) – représentant 7% des investisseurs dont trois sur dix-huit ont leurs sièges sociaux en Afrique (au Nigéria et à l’île Maurice), les quinze autres étant majoritairement européens.

 

Les défis de l’investissement d’impact en Afrique

L’investissement d’impact en Afrique fait face à plusieurs défis.

Premièrement, la déconnexion entre la nationalité des fonds et celle du pays et de l’entreprise dans lesquels ils investissent est la source d’un des défis des investisseurs sur le continent africain. Investir dans la monnaie locale de l’entreprise financée ou dans la monnaie des investisseurs est un des dilemmes qui se présentent à eux. Ce dilemme conduit souvent à un « désalignement des devises ». Les chocs du marché de la monnaie peuvent être un facteur bloquant pour l’allocation des fonds et peuvent servir d’argument de désistement pour les détenteurs de fonds et les institutions financières locales.

La difficulté à mesurer et démontrer l’impact réel de ces investissements est également un des défis majeurs de ce secteur en Afrique. En effet, ses impacts économiques sont plus élevés que ce que les données peuvent mettre en évidence – comme le cas de la LDB.

Pourtant, il est essentiel pour les investisseurs d’impact d’être en mesure de démontrer leurs impacts sur la communauté et contribuer ainsi à la construction de leur légitimité et crédibilité auprès des allocateurs de capitaux, qui sont majoritairement des fondations et des institutions financières de développement (IDF). Le manque de personnel qualifié et le coût élevé des systèmes d’évaluation expliquent en partie la difficulté des investisseurs d’impact à prouver leur crédibilité auprès de ces derniers afin de les soutenir dans leur levée de fonds. La lourdeur administrative liée à ces levées de fonds est également une des raisons pour lesquels on constate une diminution de la création de nouveaux fonds depuis le début du siècle. Cette problématique de ressources humaines s’explique par le caractère concurrentiel du marché du travail. Devant embaucher du personnel hautement qualifié, ils font face à la concurrence en raison d’une fourchette de salaires plus élevée chez les concurrents comme les IFD elles-mêmes, ou les agences de développement. Il est malheureusement difficile pour eux de s’aligner sur ces mêmes critères.

Un autre défi, concerne la difficulté de sortie due à la taille limitée de l’écosystème de l’investissement d’impact. Peu d’investisseurs qu’ils soient internationaux ou nationaux sont intéressés par le rachat de leurs parts. La vente de ces derniers dans les entreprises financées peut, de cette manière, s’étaler dans le temps, au-delà de la maturité définie au départ, et être un facteur dissuadant les investisseurs d’impact eux-mêmes.

 

En conclusion, pour bénéficier du plein potentiel de l’investissement d’impact, il est indispensable d’accroître le financement des fonds d’investissement d’impact locaux en simplifiant les procédures et en innovant pour attirer les investisseurs institutionnels. Accompagner son développement en mettant en place des mécanismes d’amélioration de la balance rendement-risque, notamment par le développement d’instruments spécifiques et de marchés secondaires, servirait de levier pour soutenir l’émergence de ce secteur. Enfin, il est important d’améliorer la qualité des fonds et leurs méthodologies de mesure de l’impact, en soutenant les équipes, en partageant les meilleures pratiques et mettant en place des incitations dédiées. La Chaire investissement d’Impact de la Ferdi aborde ces enjeux dans son agenda de recherche.

Aucun commentaire sur Quel financement pour le secteur privé en Afrique ? La place de l’investissement d’impact ?

Renforcer en urgence le tissu d’entreprises privées africaines : pourquoi et comment?

Au-delà des déclarations d’intention régulièrement renouvelées à l’occasion des Sommets internationaux, il faut enfin passer à l’échelle pour financer massivement les PME en Afrique, faire émerger un tissu économique puissant…

Au-delà des déclarations d’intention régulièrement renouvelées à l’occasion des Sommets internationaux, il faut enfin passer à l’échelle pour financer massivement les PME en Afrique, faire émerger un tissu économique puissant d’entreprises privées et ainsi relever le défi d’un meilleur développement du continent.

Aucun commentaire sur Renforcer en urgence le tissu d’entreprises privées africaines : pourquoi et comment?

Promouvoir l’éducation en Afrique : pour une nouvelle approche partenariale

Face aux nombreux défis de l’éducation en Afrique, une dynamique entrepreneuriale bouillonnante et porteuse de solutions innovantes est en train d’émerger. Les investisseurs d’impact, caractérisés par leur intention de générer…

Face aux nombreux défis de l’éducation en Afrique, une dynamique entrepreneuriale bouillonnante et porteuse de solutions innovantes est en train d’émerger. Les investisseurs d’impact, caractérisés par leur intention de générer un impact social et/ou environnemental positif, peuvent apporter un appui décisif à cette dynamique. Mais il apparaît nécessaire de développer des outils spécifiques et une véritable approche partenariale avec les autres parties prenantes du secteur afin de faire émerger une nouvelle génération d’écoles privées responsables et pleinement tournées vers les enjeux de développement du continent.

 

De l’éducation à l’emploi : de nombreux enjeux à relever en Afrique

Malgré d’immenses progrès réalisés depuis le début des années 2000, les systèmes éducatifs africains connaissent une situation critique et peinent à garantir un apprentissage et une insertion réussis aux jeunes africain.e.s. La scolarisation primaire atteint progressivement son objectif d’universalité en Afrique grâce à l’effort massif fourni par les gouvernements africains et leurs partenaires dans le cadre des Objectifs de Développement Durable, mais 34 millions d’enfants ne sont toujours pas sur les bancs de l’école primaire[i], notamment dans les pays fragiles ou en situation de conflit[ii]. De plus, de nombreuses évaluations nationales et internationales ont montré que les élèves africains, dans leur majorité, n’acquièrent pas les savoirs et compétences fondamentaux à l’issue de la scolarisation obligatoire[iii]. Les écoles sont confrontées à de nombreux déficits en ressources humaines, matérielles et pédagogiques et les effectifs toujours nombreux dans beaucoup d’écoles publiques génèrent plus de frustration que d’apprentissage[iv].

Alors qu’une minorité des effectifs accède à l’enseignement supérieur et à la formation professionnelle, ces formations sont bien souvent jugées trop théoriques et déconnectées des besoins des employeurs locaux ou internationaux[v]. Si les taux de chômage de jeunes en Afrique ne sont pas plus hauts que dans les autres régions du globe, les taux d’emploi informel et de travailleurs pauvres demeurent eux critiques et constituent un risque croissant de déstabilisation sociale et politique[vi].

 

L’essor du privé dans le secteur éducatif africain

Le secteur privé de l’éducation, dans toute sa diversité, apparait progressivement comme un acteur important pour faire face à ces enjeux. On estime aujourd’hui qu’environ un élève sur cinq en Afrique est scolarisé dans un établissement privé[vii]. Mais derrière ce chiffre se cache un secteur très varié, composé d’écoles confessionnelles, d’établissements lucratifs, de structures informelles ou bien d’écoles directement gérées par des acteurs philanthropiques.

Pourtant une dynamique semble commune à de nombreux pays africains : les opérateurs privés gagnent du terrain et accroissent l’offre de formation disponible dans la plupart des cycles éducatifs, dans des contextes institutionnels pourtant très différenciés.

Cette expansion progressive du secteur privé de l’éducation constitue à la fois une opportunité et un défi considérable pour tous les acteurs de la chaine éducative. Les États et leurs partenaires doivent notamment agir pour renforcer leur capacité de régulation de ces opérateurs privés et s’assurer qu’aucun établissement éducatif, qu’il soit public ou privé, ne puisse rompre la confiance nécessaire entre l’école, l’apprenant et la société.

Un incroyable dynamisme entrepreneurial tourné vers l’éducation émerge aux quatre coins du continent, soulevant autant de promesses que de nouveaux enjeux à affronter. Des solutions de e-learning aux plateformes de cours par SMS en passant par des séances de coaching pour enseignants, les entrepreneurs ne sont pas à court d’idées pour expérimenter de nouveaux modèles pédagogiques et pour s’affranchir des contraintes matérielles qui entravent depuis longtemps des systèmes éducatifs entiers. Dans cet essor de solutions prometteuses pour bâtir l’école africaine de demain, le rôle de la recherche et de l’évaluation d’impact sera majeur pour sélectionner les modèles les plus pertinents et capables de renforcer l’apprentissage puis l’insertion de tous les apprenants. Le rôle des technologies et de l’éducation par voie dématérialisée dans les systèmes éducatifs africains devient aussi un élément de débat incontournable pour toutes les parties prenantes du système éducatif (gouvernements, entrepreneurs, professeurs, parents d’élèves et apprenants).

Un incroyable dynamisme entrepreneurial tourné vers l’éducation émerge aux quatre coins du continent, soulevant autant de promesses que de nouveaux enjeux à affronter

Le dynamisme entrepreneurial n’est par ailleurs pas le seul fait des stars de l’ed-tech, bien au contraire. Des centaines d’entrepreneurs ingénieux font face à des défis logistiques et institutionnels complexes pour fournir aux écoles des manuels scolaires, du mobilier et des équipements tout aussi indispensables à l’apprentissage des élèves que des tablettes numériques dernier cri. Ainsi, au Niger, l’entreprise Éditions Afrique Lecture[viii] propose une offre d’anales de baccalauréat qui était jusqu’alors inexistante et qui s’avère fondamentale pour la réussite des élèves du secondaire. Dans ce type d’aventures entrepreneuriales, la relation stratégique avec les pouvoirs publics et les autres parties prenantes du système éducatif est au moins aussi importante que l’utilisation des technologies pour proposer des services véritablement utiles aux écoles et apprenants locaux.

 

Quel rôle pour les investisseurs d’impact ?

Les investisseurs d’impact doivent accompagner ce dynamisme entrepreneurial à tous les stades de maturité des projets, avec des attentes de rendement adaptés. Les études de marché du secteur éducatif africain montrent qu’aujourd’hui la plupart des investisseurs n’accompagnent que des écoles et universités déjà très bien structurées, et dans de nombreux cas, destinées à offrir des services éducatifs qu’aux classes les plus aisées de la population. Dans une moindre mesure, ces investisseurs ont aussi soutenu des projets éducatifs innovants et plus accessibles, mais contraints de grandir à une vitesse démesurée pour satisfaire leurs propres exigences de rentabilité. L’exemple bien connu de Bridge Academies[ix] en Afrique de l’Est a rappelé combien il était difficile pour un réseau d’écoles à bas prix de passer à l’échelle sans détériorer la qualité des enseignements… et les relations de l’enseigne avec les autorités publiques. En dehors de ces configurations, des pans entiers de la finance d’impact dédiée à l’éducation restent à bâtir, en particulier en Afrique francophone et lusophone. Les fonds d’impact doivent trouver les moyens de soutenir des projets moins matures, par exemple dans les cycles de l’enseignement technique et professionnel où l’État et ses partenaires restent en retrait. Il est ainsi impératif pour ces investisseurs de définir des instruments d’accompagnement ainsi que des exigences de rentabilité et d’impact qui soient adaptées à un secteur social au temps long et devant intégrer tous les groupes sociaux, notamment les jeunes femmes et les apprenants les plus vulnérables.

Des pans entiers de la finance d’impact dédiée à l’éducation restent à bâtir, en particulier en Afrique francophone et lusophone

Afin de soutenir l’émergence d’offre éducatives accessibles et de qualité, les investisseurs devront faire preuve d’ingéniosité pour bâtir des partenariats inédits avec d’autres parties prenantes du secteur. Des partenariats avec des fondations et autres bailleurs philanthropiques permettront aux investisseurs d’impact d’élargir l’accès aux établissements de leur portefeuille aux jeunes issus de milieux défavorisés. Des dispositifs de bourses ou de prêts étudiant financés par ces fondations pourraient démocratiser l’accès à des établissements privés de qualité dont les engagements en matière d’impact seront garantis par la présence au capital d’un investisseur éthique. De plus, ces associations entre équipes d’investissement d’impact et acteurs philanthropiques pourraient viser à soutenir des jeunes pousses et autres projets peu matures. L’exemple pionnier de l’Education Impact Fund en Côte d’Ivoire[x], fruit d’un partenariat entre la Fondation Jacobs et le fonds d’impact Comoé Capital, est à ce titre un parfait exemple. Ce programme a bénéficié à 6 jeunes pousses particulièrement prometteuses du secteur éducatif ivoirien parmi lesquelles on trouve un centre de formation des métiers de l’hôtellerie[xi] en pleine cœur du quartier populaire de Yopougon ou la start-up Etudesk[xii], récemment sélectionnée parmi les 10 Ed-Tech les plus en vue sur le continent[xiii]. Le succès de ce programme d’investissement repose d’une part sur l’utilisation ciblée d’un capital risque fourni par un bailleur philanthropique et d’autre part sur une équipe d’investissement particulièrement engagée au côté des entrepreneurs. Mais bien d’autres schémas d’intervention sont imaginables. Des partenariats avec des institutions de recherche seraient aussi pertinents pour mesurer et évaluer les effets de long terme en matière d’apprentissage et d’insertion des modèles soutenus par les investisseurs. Ainsi, l’essor d’instruments de financement mixtes[xiv] au service de l’éducation sera clé pour apporter des solutions d’accompagnement adaptées à l’émergence d’opérateurs privés responsables et engagés.

 

En conclusion

Pour répondre aux enjeux de qualité, d’accès et de pertinence de l’éducation en Afrique, les investisseurs d’impact devront concevoir et mobiliser des stratégies et des modes d’interventions innovants et adaptés aux réalités d’un secteur social en crise et d’un écosystème entrepreneurial bouillonnant. Du soutien actif des organisations bilatérales et multilatérales de développement dépendra la crédibilité et la viabilité de ces nouveaux modèles de financement mixte et de partenariats inédits. Par leur gouvernance et leurs pratiques, les fonds d’impact ne pourront s’affranchir d’un dialogue continu avec les autorités publiques sectorielles pour s’assurer de leur bonne insertion dans les écosystèmes éducatifs locaux. Associées à des acteurs philanthropiques experts du secteur, ces nouvelles initiatives devront soutenir les écoles et les activités auxiliaires au sein des cycles et des filières de formation prioritaires pour le développement local. C’est avec cet esprit d’innovation, de coopération et de partenariat que les investisseurs d’impact se donneront les moyens de contribuer de façon pertinente aux enjeux de l’éducation en Afrique.

 

Pour aller plus loin…

La FERDI a publié en septembre 2019 l’étude “Promouvoir l’éducation en Afrique : défis et opportunités pour l’investisseur d’impact'”, conduite par Tom Dilly, chargé de projet éducation chez I&P, et Francesca Marchetta, Professeure au CERDI. L’étude présente notamment une cartographie des investisseurs privés dans l’éducation, une revue de littérature approfondie mettant en évidence les pratiques à fort impact, ainsi qu’une nouvelle typologie des acteurs privés opérant dans le secteur éducatif.

Cliquez ici pour télécharger l’étude

 

 

 


Références

[i] Voir les données complètes de l’UNESCO (2018):  http://uis.unesco.org/sites/default/files/documents/fs48-one-five-children-adolescents-youth-out-school-2018-en.pdf

[ii] Voir la page 10 (figure 6) du document cite précédemment: la plupart des pays durement touchés par la non-scolarisation des enfants à l’école primaire sont situés au Sahel ou en Afrique Centrale.

[iii] Le rapport mondial sur le développement 2018  publié par la Banque Mondiale analyse en profondeur cette crise de l’apprentissage: http://www.worldbank.org/en/publication/wdr2018

En Afrique francophone, les performances des élèves au début et à la fin du cycle primaire sont évaluées par le PASEC tous les 3-5 ans environ. http://www.pasec.confemen.org/

[iv] De nombreux rapports ont mis en exergue ces déficits de matériel et d’équipement dans les écoles, ainsi que la taille des classes pouvant atteindre en moyenne 50 enfants au Burkina ou Mali et jusqu’à 90 au Malawi et en Centrafrique. http://uis.unesco.org/sites/default/files/school-resources-and-learning-environment-in-africa-2016-en/school-resources-and-learning-environment-in-africa-2016-en.pdf

[v] Sur l’enjeu de la pertinence de l’éducation et de l’adéquation nécessaire entre formations et emploi, voir le rapport de la Banque Mondiale (2014) : http://www.worldbank.org/en/programs/africa-regional-studies/publication/youth-employment-in-sub-saharan-africa Ce phénomène se traduit parfois aussi par un taux de chômage plus élevé des élèves diplômés que des non diplômés dans plusieurs africains, montrant qu’avec formations diplômantes sont peu adaptées au marché du travail, les étudiants sortant ont du mal à se faire embaucher dans des postes qualifiés.

[vi] Le taux moyen de chômage des jeunes en Afrique Sub-Saharienne est de 6%, la moyenne mondiale étant de 5%. Mais ce taux cache des réalités bien plus précaires, avec des taux d’auto-emploi qui peuvent atteindre 70% en RDC ou au Ghana, et le taux de travailleurs pauvres pourrait atteindre 80% selon le BIT. https://www.un.org/africarenewal/magazine/may-2013/africa%E2%80%99s-youth-%E2%80%9Cticking-time-bomb%E2%80%9D-or-opportunity

[vii] Ce chiffre est calculé par l’équipe du Rapport “Business of Education in Africa” (2017)  https://edafricareport.caeruscapital.co/thebusinessofeducationinafrica.pdf

[viii] http://afriquelecture.com/index.html

[ix] Voir notamment l’article de RFI (2018) à a ce sujet: http://www.rfi.fr/afrique/20180301-ecole-privees-bas-prix-bridge-international-academies-lettre-fermeture-ong

[x] Voir le site du partenariat : http://www.edimpactfund.com/ mais aussi l’annonce des premiers investissements en 2018 : http://www.ietp.com/fr/content/investissement-editions-vallesse . Le portefeuille complet des six investissements sera publié prochainement.

[xi] https://www.facebook.com/roijuvenal/

[xii] https://www.etudesk.com/

[xiii] Voir les startups sélectionnées à la célèbre conférence sur l’éducation globale de Dubai (22 au 24 mars 2019) https://www.forbes.com/sites/mfonobongnsehe/2019/02/25/meet-the-10-african-startups-competing-for-the-next-billion-edtech-prize-in-dubai/#46d350f03e1b

[xiv] ou aussi appelés blended finance et qui font référence à l’utilisation de « capitaux catalytiques » provenant de sources publiques ou philanthropiques pour accroître l’investissement du secteur privé dans les pays en développement ». https://www.convergence.finance/blended-finance

Par :
Aucun commentaire sur Promouvoir l’éducation en Afrique : pour une nouvelle approche partenariale

Saisissez votre recherche puis validez avec la touche Entrée