Selon un rapport de la BCEAO (Banque Centrale des États de l’Afrique de l’Ouest), le taux de bancarisation strict en Afrique subsaharienne est passé de 19% à 21.8% entre 2020 et 2021. Une évolution régulière et soutenue depuis les dix dernières années mais qui place encore les pays de la zone UEMOA parmi les pays ayant les plus faibles taux de bancarisation dans le monde.
Ce faible taux prive une importante partie de la population de services financiers de base et limite leur participation à l’économie formelle. Ce retard est aujourd’hui en grande partie compensé par l’adoption massive de nouvelles technologies financières (FinTech) sur le continent, notamment le mobile banking, plus encore depuis la période Covid.
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Entreprenante Afrique s’est entretenue avec Omar Cissé, fondateur de InTouch, Fintech panafricaine lancée en 2014 proposant une solution digitale panafricaine et sur mesure, de gestion de paiement sécurisée, permettant à ses utilisateurs d’administrer, depuis une plateforme unique, la quasi-totalité des moyens de paiement présents dans les pays où InTouch est déployé.
Omar Cissé revient avec nous sur la trajectoire de InTouch depuis sa création, les facteurs de succès, ce qu’apporte la FinTech dans le paysage économique africain et aux entrepreneurs en particulier.
Entreprenante Afrique : En un peu moins d’une décennie, InTouch s’est imposé dans le paysage de la FinTech en Afrique. Est-ce que InTouch peut être considéré comme une licorne ?
Omar Cissé : Nous espérons le devenir d’ici 2027. Nous avons un EBITDA positif depuis 2022, nous devenons une entreprise profitable et nous redoublons d’efforts pour assurer la croissance de l’entreprise.
189 millions de transactions pour un volume de transactions total de 2 730 millions d’euros.
Nous avons lancé la version test de InTouch en 2015 et enregistré dès 2017 environ 5 millions de transactions. Mais le point de bascule a été l’avènement de la crise Covid. À l’annonce de l’adoption des mesures sanitaires, petites, moyennes et grandes entreprises ont voulu numériser leurs moyens de paiement. Depuis, la tendance n’a fait que s’accélérer. En 2024, nous avons enregistré 189 millions de transactions pour un volume de transactions total de 2 730 millions d’euros.
Actuellement, InTouch est présent dans 16 pays et a pour ambition d’en couvrir 25 d’ici 2025. Nous prenons en charge près de 300 moyens de paiements différents et avons 48 000 TouchPoint répartis dans nos pays d’implantation.
Entreprenante Afrique : Comment expliquez-vous cette ascension fulgurante ?
Omar Cissé : Au-delà des facteurs externes comme le Covid et le développement technologique, le facteur humain y est pour beaucoup. Nous misons énormément sur cet aspect de notre entreprise. Nous avons commencé l’aventure avec 4 personnes en 2015. Aujourd’hui nous sommes 400 professionnels : des développeurs, des commerciaux et énormément de profils différents, répartis dans chaque pays d’implantation de InTouch et structurés autours de hubs (la Côte d’Ivoire pour l’Afrique de l’Ouest, le Kenya pour l’Afrique de l’Est, le Cameroun pour l’Afrique Centrale et l’Égypte pour l’Afrique du Nord) pour apporter une expérience sur-mesure et beaucoup plus de proximité avec nos clients.
Le deuxième facteur, ce sont nos actionnaires et partenaires stratégiques : le groupe TotalEnergies, la CFAO, ou encore Worldline qui a largement contribué à notre succès grâce au transfert de technologie.
Une solution de gestion d’un volume exponentiel de petites transactions faites sur énormément de supports différents
Le troisième, ce sont les moyens financiers. Depuis notre lancement, nous avons réalisé des levées de fonds successives, de 7 à 9 millions d’euros tous les deux ans. La fintech est l’un des segments les plus attractifs en matière d’investissement dans le paysage technologique africain.
Et le dernier point qui explique notre essor est la confiance que nous avons su générer tout au long du parcours auprès de nos clients et de nos financeurs depuis le lancement de InTouch.
La particularité de InTouch se retrouve dans le fait que nous offrons à nos clients, quel que soit leurs stades de développement (Start-Up, PME et grandes entreprises), une solution de gestion d’un volume exponentiel de petites transactions faites sur énormément de supports différents, le tout sur une seule et même plateforme, ce qui facilite le suivi et le reporting des opérations financières.
Entreprenante Afrique : Dans quel mesure la FinTech, et en particulier InTouch, modifie le paysage économique africain ? Êtes-vous en concurrence avec le secteur financier traditionnel ?
Omar Cissé : Nous ne sommes absolument pas en concurrence avec les banques ni les institutions de microfinance. Nous nous positionnons en tant que partenaire technique en digitalisant les relations financières. Sur d’autres aspects, InTouch vient combler le vide laissé par le retard de déploiement du secteur bancaire en proposant par exemple l’opportunité aux petits commerçants d’accéder à des nano-crédits sur une plateforme dédiée à des taux très accessibles. Il s’agit encore d’un projet pilote mais là encore, ce sont nos partenariats avec les IMF qui rendent ces opérations possibles, InTouch n’étant pas une institution financière à proprement parler.
L’essor de la FinTech porte dans son sillage une promesse d’inclusion financière au plus grand nombre
Les petits commerçants et petites entreprises sont notre première cible depuis le début. Nous comptons parmi nos clients 16 000 petits commerçants au Sénégal et 34 000 sur le reste du portefeuille.
Avant InTouch, j’ai accompagné beaucoup d’entreprises, que cela soit à travers CTIC Dakar ou Teranga Capital. Et par expérience, je peux dire que la gestion des paiements constitue un maillon faible pour l’entrepreneuriat, encore plus en Afrique. Que ces entreprises puissent collecter tous les moyens de paiement, change vraiment la donne pour elles. Nous parlons de gestions de paiements sécurisées, une facturation précise, un système de suivi et d’enregistrement offrant un gain de productivité important, et par conséquent une lecture et une analyse financière beaucoup plus évidentes pour les entrepreneurs.
Plus largement, l’essor de la FinTech porte dans son sillage une promesse d’inclusion financière au plus grand nombre, la démocratisation des services financiers de base : services bancaires, systèmes de paiement, crédits, épargnes, assurances etc…